Soins compatissants, centrés sur la personne et dignes : l'art des soins infirmiers en fin de vie, Hong Kong

JII COVID-19
28 Septembre 2021
IND2021 teaser

Contribution : Helen Chan, RN, BSN(Hons), PhD, professeure associée, The Nethersole School of Nursing, The Chinese University of Hong Kong, Hong Kong Association of Gerontology, Chine

Dans le prolongement de notre étude de cas sur les soins palliatifs en Israël, la semaine dernière, et avant la Journée internationale des personnes âgées, le 1er octobre, nous vous présentons une expérience réalisée par des infirmières à Hong Kong pour aider les personnes âgées à vivre leurs derniers jours de manière plus paisible.

IND2021 case study Hong Kong

L'espérance de vie des habitants de Hong Kong est l'une des plus élevées au monde, près des deux tiers des décès intervenant chez des personnes âgées de 65 ans ou plus. Cependant, selon un rapport sur « l'indice de qualité de la mort » (Lien Foundation 2015), les soins de fin de vie dans la région sont encore lacunaires. Les questions relatives à la mort et aux personnes en fin de vue restent un tabou culturel, ce qui rend difficile de connaître les préférences des patients en matière de soins de fin de vie.

Les admissions répétées à l'hôpital sont fréquentes dans la dernière phase de la vie en raison de l'insuffisance des services communautaires de soins palliatifs. En raison d'obstacles opérationnels et juridiques, la majorité des décès dus à des maladies en phase terminale surviennent dans des hôpitaux de soins aigus. D’autre part, les soins sont principalement axés sur la guérison, à moins que la famille ne parvienne à un consensus. Comme les familles endeuillées ne sont généralement pas préparées au décès de leur proche, elles sont généralement insatisfaites des soins prodigués, tout en éprouvant culpabilité ou colère. Quant aux prestataires de soins de santé, ils expriment également leur insatisfaction face à la qualité des soins de fin de vie. Tous ces problèmes ont rendu nécessaire l’élaboration urgente d’un modèle de prestation de soins culturellement adapté destiné à optimiser les soins de fin de vie dans la communauté.

Depuis 2016, l'Association de gérontologie de Hong Kong a été en pointe d'un projet intitulé « Soins palliatifs et de fin de vie dans les établissements de soins résidentiels pour personnes âgées à Hong Kong », avec le financement du Hong Kong Jockey Club Charities Trust. Le projet est placé sous la supervision du Dr Edward Man-fuk Leung et d'un comité directeur multidisciplinaire. Ce dernier est dirigé par un groupe d'infirmières expérimentées et passionnées de soins gériatriques, de soins palliatifs et de gestion des soins infirmiers, dont Cecilia Nim-chi Chan, ancienne directrice générale des soins infirmiers dans un hôpital ; Faith Chun-fong Liu, infirmière consultante en soins palliatifs ; et Man Chui-wah, ancienne directrice chargée de la supervision des services médicaux et gériatriques d'un hôpital. Le projet porte sur le renforcement des capacités, la restructuration de l'environnement, l'élaboration de protocoles et l'éducation du public. L'Association a joué un rôle central dans la négociation avec les équipes de soins gériatriques de proximité, avec les services hospitaliers, avec les services ambulanciers et avec les services funéraires pour faciliter la mise en œuvre de ce nouveau modèle de soins. À ce jour, près de cinquante établissements de soins ont participé au projet.

À titre d’exemple de l'efficacité du projet, voici le cas de Mme L., une dame de 86 ans souffrant d'insuffisance cardiaque congestive, de démence et d'une grave maladie pulmonaire obstructive chronique. Mme L. a été orientée vers le projet en raison de son état de santé instable. Vu sa dépendance très grande, Mme L. a été admise dans une maison de soins, où elle a bénéficié des visites quotidiennes de sa fille. En août 2020 cependant, Mme L. a été transférée à l'hôpital car son taux d'oxygène avait chuté et elle avait un faible appétit depuis quelques jours. Des antibiotiques lui ont été administrés par voie intraveineuse et l'équipe médicale a envisagé une alimentation par sonde nasogastrique. En raison des mesures de contrôle des infections, les membres de sa famille n'ont plus été autorisés à lui rendre visite à l'hôpital et étaient par conséquent très inquiets. Avec le soutien du projet, son fils et sa fille ont pu discuter des soins de fin de vie devant être prodigués à Mme L. Après délibération, ils ont estimé que des soins de confort seraient dans le meilleur intérêt de leur mère. L'infirmière du projet a communiqué leur décision à l'équipe médicale de l'hôpital.

Mme L. est retournée dans sa maison de soins et l'alimentation par sonde a été suspendue. Elle a séjourné dans une chambre individuelle spécialement assignée au projet, afin que sa famille puisse l'accompagner – le fait de disposer d’une chambre individuelle est un privilège à Hong Kong, les chambres partagées entre deux à six résidents étant généralement la norme dans les établissements de soins. Ses enfants et le personnel ont remarqué que Mme L. était capable de leur répondre en hochant la tête et en souriant. Les infirmières et le personnel soignant lui ont prodigué des soins personnels d'hygiène et de confort. Le médecin visiteur du projet et l'équipe de proximité de l'hôpital sont venus régulièrement surveiller son état pendant deux semaines. Mme L. est morte paisiblement en compagnie des membres de sa famille, dans sa maison de soins.

Le parcours de Mme L. permet d'apprécier l'art des soins infirmiers en fin de vie et la continuité des soins qu’ils rendent possible. Les infirmières ont évalué les besoins en soins de Mme L. et des membres de sa famille en temps opportun ; elles leur ont donné les moyens d'exprimer leurs préoccupations et leurs souhaits en matière de soins ; elles ont servi de passerelle de communication entre les membres de la famille, les différents secteurs de soins et les équipes de santé ; et elles ont prodigué à Mme L. des soins compatissants, centrés sur la personne et dignes dans les derniers jours de sa vie.

Le projet a favorisé une culture visant à améliorer les soins de fin de vie et à faciliter la mise en œuvre du programme « mourir chez soi » dans la communauté. Mais beaucoup d'améliorations sont encore possibles.

Pendant le projet COVID-19, les politiques de restriction des visites dans les maisons de soins et les hôpitaux ont entraîné des difficultés au niveau du contact personnel avec les clients. Les infirmières ont trouvé plus difficile de fournir des soins et un soutien en temps opportun. Cependant, les télécommunications ont été utilisées pour se connecter aux clients et aux autres prestataires de soins de santé afin de maintenir une communication étroite.

Pour regarder une vidéo sur ce projet, veuillez cliquer ici.

Lien Foundation (2015). The 2015 Quality of Death Index: Ranking palliative care across thew world. A report by the Economist Intelligence Unit. Sur Internet : http://www.lienfoundation.org/sites/default/files/2015%20Quality%20of%20Death%20Report.pdf